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L’art de pardonner sans s’oublier

  • Photo du rédacteur: Zarah Medium
    Zarah Medium
  • 18 août
  • 5 min de lecture

Dernière mise à jour : 19 août

un coeur réparer apres une trahison

Le piège du pardon “à tout prix”

On nous l’a répété à toutes les sauces : “Il faut pardonner.”Dans les cercles spirituels, on le présente même comme le Graal : celui qui pardonne serait forcément plus évolué, plus lumineux, presque saint. Mais en réalité, mal compris, le pardon peut devenir une forme subtile d’auto-trahison.

Parce qu’il existe un “pardon façade” celui qu’on offre pour avoir la paix, pour ne pas perdre l’approbation des autres, ou parce qu’une religion ou un code moral nous l’impose.


Ce pardon-là ressemble à un joli vernis… qui recouvre une plaie non soignée.

Pardonner, ce n’est pas serrer la main à celui qui nous a poignardés et dire “tout va bien”.

C’est encore moins faire semblant d’avoir oublié et certainement pas se laisser remettre dans la même situation toxique au nom de “l’amour universel”.

Le pardon véritable, celui qui libère, ne se donne pas à la légère, il demande clarté, discernement et surtout, un profond respect de soi.

Le vrai sens du pardon

Spirituellement, pardonner ne signifie pas effacer l’offense, ni même rétablir la relation, c’est avant tout se désencombrer; c’est dire : “Ce que tu as fait est réel, mais il ne dictera plus mon état intérieur.” le pardon n’est pas un effacement du passé, c’est un détachement du poids émotionnel qu’il exerce.

Ce détachement, c’est un acte de puissance : il arrache les crochets que l’offense a plantés dans notre esprit, il libère l’énergie qui, jusque-là, nourrissait la colère, la tristesse, la rancune.

Mais attention : pardonner n’est pas oublier, d’ailleurs, dans bien des cas, ne pas oublier est une question de survie spirituelle et émotionnelle, l’oubli complet, c’est parfois rouvrir la porte aux mêmes blessures.

Les risques du pardon mal compris

Un pardon mal compris peut devenir une prison dorée, il y a le pardon tapis, où l’on enfouit la colère sous une couche de “c’est pas grave”...mais cette colère refait surface tôt ou tard, souvent sous une autre forme : épuisement, déprime, irritabilité! Il y a aussi le pardon toxique, celui qui sert d’excuse pour ne pas mettre de limites. “J’ai pardonné, donc je dois continuer à accepter.” Non. Le pardon n’implique pas de garder le lien.

Certaines cultures religieuses ou familiales ajoutent à ce piège une pression morale : “Si tu ne pardonnes pas, tu n’es pas une bonne personne.” C’est faux. Refuser un pardon forcé n’est pas un manque d’amour, c’est parfois une preuve de respect pour soi-même et pour la vérité.

Ce que disent les traditions spirituelles

Christianisme  Jésus pardonne même à ceux qui le crucifient : “Père, pardonne-leur, car ils ne savent pas ce qu’ils font” (Luc 23:34). Mais il met aussi en garde : “Ne donnez pas les choses saintes aux chiens, et ne jetez pas vos perles devant les pourceaux” (Matthieu 7:6). Ce qui signifie : offre ton pardon, mais protège ton cœur. Le pardon chrétien est un acte d’amour qui libère le cœur, mais ne nie pas la nécessité de prudence.

Bouddhisme Bouddha enseigne que garder la colère, c’est “saisir un charbon ardent avec l’intention de le lancer sur quelqu’un : c’est soi-même qu’on brûle”. Pardonner, c’est donc se libérer du poison intérieur, mais cela ne signifie pas excuser l’acte : il faut reconnaître la souffrance avant de la laisser se dissoudre.

Judaïsme  Le pardon s’inscrit dans un processus de Teshouva (retour, repentir) : reconnaissance de la faute, réparation, puis demande sincère de pardon. La Torah n’impose pas de pardonner à quelqu’un qui ne reconnaît pas sa faute. Ici, le pardon n’est pas une injonction aveugle : il exige que justice et vérité soient honorées.

Soufisme  Le pardon est perçu comme un acte qui élève l’âme et rapproche de Dieu (Allah). Les maîtres soufis enseignent que pardonner, c’est briser les chaînes de l’ego, car la rancune nous enferme dans la séparation. Mais ce pardon n’est pas naïveté : il est accompagné de discernement. Rûmî écrivait : “Pardonne, non pour effacer l’histoire, mais pour libérer ton cœur et le laisser boire à la source de l’Amour.”

Psychologie contemporaine  Les thérapeutes voient le pardon comme un processus et non un ordre moral. Il nécessite de traverser les émotions, parfois sur de longues périodes. Pardonner trop tôt ou sous pression peut aggraver la blessure au lieu de la guérir.

Les étapes d’un pardon qui ne s’oublie pas soi-même

Reconnaître la blessure  Ne pas minimiser ce qui s’est passé. C’est la première étape pour éviter le faux pardon.

Mettre des limites claires  Pardonner ne signifie pas se rendre disponible pour une nouvelle offense. Les limites sont la clôture qui protège la guérison.

Retirer le pouvoir émotionnel à l’offense  Tant que la colère occupe notre esprit, l’offenseur a encore du pouvoir sur nous.

Laisser la justice suivre son cours  Ce peut être la justice humaine, la justice divine ou la loi du karma.

Avancer Choisir consciemment de marcher en avant, non pas en niant le passé, mais en refusant qu’il définisse l’avenir.

Le pardon envers soi-même

On oublie souvent cet aspect : il n’y a pas que les autres à pardonner. Parfois, la personne qui nous a le plus trahi… c’est nous-même.Se reprocher éternellement une erreur, une faiblesse, un mauvais choix, c’est rester enfermé dans une cellule dont on a soi-même la clé.

Le pardon envers soi n’est pas de la complaisance : c’est reconnaître qu’on a agi avec le niveau de conscience qu’on avait à ce moment-là, et choisir de ne plus s’auto-condamner. C’est un acte profondément spirituel, car on accepte enfin que la grâce s’applique aussi à soi.

Les répercussions spirituelles du non-pardon

Ne pas pardonner, c’est garder un lien invisible avec l’offenseur. C’est continuer à lui envoyer de l’énergie, à lui laisser une place dans notre cœur et notre esprit.Spirituellement, la rancune agit comme une corde qui nous attache à la personne ou à la situation. Tant qu’on ne la coupe pas, on reste prisonnier du passé.

Certaines traditions disent même que les rancunes non libérées suivent l’âme dans d’autres vies, jusqu’à ce qu’elles soient dissoutes. Ainsi, pardonner n’est pas seulement un acte pour le présent, mais une libération pour l’âme sur le long terme.

Le pardon comme force

Pardonner, c’est se relever, pas s’agenouiller.C’est refuser de laisser le mal dicter nos émotions. C’est reprendre la maîtrise de notre cœur, comme on referme une porte après une tempête.

Et spirituellement, chaque pardon lucide crée une onde de paix dans l’univers. Ce n’est pas juste notre blessure qui s’apaise : c’est un fil de haine en moins dans le grand tissu humain.

Conclusion : pardonner sans s’effacer

Le pardon n’est pas synonyme de faiblesse. C’est un art, celui de libérer son cœur sans perdre sa dignité.Pardonner ne veut pas dire oublier. Pardonner ne veut pas dire excuser. Pardonner ne veut pas dire revenir comme avant.C’est un acte spirituel, mais aussi un acte de lucidité. C’est dire : “Ce que tu as fait ne m’enchaîne plus.” Et marcher, plus léger, sans pour autant perdre la mémoire des leçons apprises.


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